Antisémite à en perdre la raison
De son vrai nom Louis-Ferdinand Destouches, Céline est d'un avis assez général considéré comme l'un des plus grands écrivains français du XXe siècle. Mais ce sont surtout ses pamphlets antisémites de 1937 qui retiennent l'attention des historiens.
Céline naît à Meudon au foyer d'un employé d'assurances qui, pour se consoler de ses ratés professionnels, avait coutume de dire : «C'est la faute aux Juifs».
Plus tard, son fils verra dans cette recherche pathétique d'un bouc émissaire l'un des fondements de l'antisémitisme populaire.
Le futur écrivain connaît dans les horreurs des tranchées l'expérience qui orientera toute son existence. Après la Grande Guerre, devenu médecin, il erre en Afrique puis se rend aux États-Unis avant de s'établir en banlieue parisienne. Son premier roman et son chef d'oeuvre, Voyage au bout de la nuit (1932) est le condensé de ces expériences. Écrit dans un style flamboyant et radicalement nouveau, il lui vaut un commencement de gloire.
Céline rencontre moins de succès avec le livre suivant, Mort à crédit (1936). Et cet homme qui se présentait jusque là comme un médecin compatissant et un intellectuel pacifiste, anticolonialiste, sensible à la misère ouvrière (il plaide déjà pour les 35 heures hebdomadaires !) et bien entendu athée, révèle tout d'un coup, l'année suivante, une facette inattendue avec Bagatelles pour un massacre et L'école des cadavres(1937).
On est alors à l'époque du Front populaire. À la tête du gouvernement figure le socialiste Léon Blum, d'ascendance juive. Une autre personnalité en vue est Georges Mandel, un autre juif, ancien collaborateur de Clemenceau. Hitler se fait de plus en plus menaçant. La guerre menace à nouveau.
Au nom d'un raisonnement délirant (pour se venger de Hitler qui est antisémite, les Juifs poussent les Anglo-Saxons à lui faire la guerre !), Céline le pacifiste développe dans son pamphlet des arguments antisémites d'une violence inouïe ; tellement inouïe que les intellectuels, à l'image d'André Gide, n'y voient que de sottes gamineries et haussent les épaules !
Il n'empêche que, de 1940 à 1944, pendant l'Occupation de la France par les Allemands, les formules à l'emporte-pièce de Céline sont récupérées par la propagande nazie et vychiste. De son côté, l'éditeur Denoël s'empresse de republier les pamphlets antisémites de Céline dans le désir de faire du chiffre : Je le dis tout franc, comme je le pense, je préférerais douze Hitler plutôt qu'un Blum omnipotent (Bagatelles pour un massacre, 1937).
Céline lui-même se tient coi ou à peu près. Mais à la Libération, quelques jours après le Débarquement de Normandie, il juge plus sain de quitter la France pour le Danemark.
Un contretemps l'amène à séjourner quelques mois à Siegmarinen, dans le château d'opérette où se sont repliés Pétain, Laval et quelques autres acteurs de la Collaboration. En 1950, il est condamné par contumace à l'indignité nationale et privé de ses biens. Il sera amnistié l'année suivante.
Source: Hérodote
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